Sénégal: Crise au sommet de l'Etat où rupture ?

Les événements de ce début du mois de novembre 2025 qui naguère avaient été considérés comme un malentendu, entre le Président de la République, Bassirou Diomaye Faye et son 1er Ministre Ousmane Sonko qui serait vite dépassé, sont en train de confirmer ce que beaucoup redoutaient.

Un ressort s’est-il cassé ? Le duo fusionnel « Sonko moy Diomaye, Diomaye moy Sonko » autrement dit, « Diomaye c’est Sonko et vice versa », est-il en train de voler en éclat ? D’aucuns le pensent, même si les raisons avancées sont différentes.

Faut-il peut-être le rappeler, l’actuel président du Sénégal a été désigné candidat du Parti PASTEF (Patriotes Sénégalais, pour le Travail l’Ethique et la Fraternité) à la présidentielle de 2024, suite à l’invalidation de la candidature du président du PASTEF et sur désignation de ce dernier, dont il a fait son premier Ministre.

Pour l’essentiel des Observateurs, entre les deux il y avait un Pacte secret entre les deux hommes et qui serait noué autour du mandat du Président Diomaye Faye, qui selon certaines indiscrétions devait se limiter à un seul mandat, après quoi Ousmane Sonko prendrait le relais, ou serait investi en 2029 comme candidat du Parti.


Suivez-nous sur WhatsApp | LinkedIn pour les derniers titres

Qu’en est-il de ce pacte ? Ce qui apparait constant, même si on en connait pas la quintessence, c’est qu’il participe d’un agenda bien ficelé. Diomaye devait engager les réformes substantielles du programme de Pastef, notamment un point qui est totalement occulté aujourd’hui, et qui concerne la réforme des institutions, qui devait, à la lumière de leur programme de campagne, consacrer le poste de vice-président de la République, dans la perspective affirmée par Pastef de réduire les pouvoirs du Président de la République considérés comme exorbitants.

Il semble à ce jour que cet agenda de réforme, en dehors des assises de la justice, jusque-là restées sans suite, n’est pas encore lancé. Or on est à quelque 3 ans de la fin du mandat, sans oublier les échéances des locales et des législatives respectivement en 2026 et 2029.

Même si par des déclarations sibyllines et parfois tranchées, on pouvait relever un certain agacement du 1er ministre face à la lenteur du fonctionnement de l’administration et de la justice, qu’il imputait indirectement au président de la République, titulaire exclusif du pouvoir de nommer aux emplois civils et militaires, les avis étaient partagés sur l’ampleur des désaccords devenus stratégiques, quoique certains tentent de les minimiser, pensant qu’un dialogue avec ou sans médiateurs pouvait arrondir les angles.

Hélas, au fur et à mesure qu’on avance, comme dans un jeu de dames, chacun avançait ses pions jusqu’à la date du 08 novembre, notamment lors du « Terra meeting » du leader du Pastef, pendant lequel il a invité le Président de la République à revenir dans le parti, alors même qu’il avait décidé de ne plus mener d’activités politiques partisanes durant son magistère. Les textes de PASTEF le prescrivent en effet. Mieux, il a annoncé la prochaine réforme de la coalition qui a porté la candidature de Bassirou Diomaye Faye, et a indiqué dans la foulée, que c’est l’actuelle coordonnatrice Mme Aida Mbodji qui serait reconduite.

Le lendemain, un courrier du Président Diomaye Faye, nomme Mme Aminata Touré son Haut Envoyée spéciale comme nouvelle coordonnatrice. La suite on la connait, le Parti Pastef a réagi par un communiqué qui, point par point, déclare ne pas reconnaitre la nouvelle coordonnatrice et, mieux, conteste le pouvoir du Président Faye de s’immiscer dans les questions partisanes, lui qui avait déclaré être au-dessus de la mêlée, et avait même démissionné de son poste de Secrétaire général du Parti PASTEF.

Si cet épisode a été un déclencheur de cette crise, il faut le dire, c’en est une et c’est grave. Il reste la question de fond, reste le mandat du président actuel, qui selon certains cercles restreints de Pastef devait s’achever en 2029, alors que le Président veut en faire un second, et du coup la réforme de la vice-présidence n’est plus à l’ordre du Jour. Il veut garder ces prérogatives de Président fort telles que la Constitution les a définies.

Dans ces conditions, dès lors que la candidature de Sonko serait aujourd’hui, en tout cas de l’avis de quelques juristes du pays, exempte de toute entrave juridique, ce dernier mobilise son parti vers cette échéance et celles qui viennent avant. Pendant ce temps, le Président Faye remobilise la coalition qui, selon lui, l’a porté au pouvoir en nommant une nouvelle coordonnatrice et en élargissant le cercle de ses alliés et soutiens.

Les positions sont par conséquent inconciliables, et il est peu certain que cette crise puisse ramener les deux protagonistes à la situation de départ. La confiance n’y est plus, malgré le vœu exprimé par une écrasante majorité de citoyens de les voir cheminer, ne serait-ce jusqu’au terme de ce premier mandat, au regard de la situation économique et géopolitique actuelle. Un vœu pieux ? Les prochains jours nous édifieront.

source

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Scroll to top
Close