RDC: «Nous résisterons jusqu'à ce que Kigali accepte un dialogue», affirment les FDLR

La RDC a lancé une campagne demandant aux Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) de se rendre et de déposer les armes, en vue de leur rapatriement au Rwanda. En cas de refus, les combattants seront contraints par la force, selon le message officiel. Cette phase de contrainte est déjà en préparation, dans le cadre de l’accord du 27 juin signé entre Kinshasa et Kigali.
Le 7 novembre 2025, la République démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda ont examiné ensemble les préparatifs des opérations militaires contre les FDLR et adopté un accord de mise en œuvre. Ces initiatives s’inscrivent dans une volonté commune d’en finir avec la présence du groupe armé, considéré comme l’un des plus anciens encore actifs dans l’est du Congo.
« Remettre les armes, c’est une utopie »
Le lieutenant-colonel Octavien Mutimura, porte-parole des FDLR-FOCA, rejette catégoriquement tout désarmement. « On doit juger la cause de notre lutte armée. Nous sommes là pour nous protéger et protéger les réfugiés rwandais abandonnés. Remettre les armes sans que toutes les conditions soient réunies, c’est une utopie », affirme-t-il à RFI.
Face à la menace d’une opération militaire conjointe, le porte-parole des FDLR se veut ferme : « Quand on est dans le feu, on ne peut pas redouter d’être attaqués. Nous sommes parmi les cibles de Kigali. Nous résisterons jusqu’à ce que Kigali admette un dialogue inter-rwandais et un retour des réfugiés en toute dignité. »
Les FDLR affirment par ailleurs être la cible d’attaques menées par l’AFC/M23. « Nous sommes dans les zones où se mènent les combats. L’AFC/M23 nous attaque et menace nos réfugiés. Nous sommes dans l’obligation de les protéger », explique Octavien Mutimura.
Un contexte de rapatriement de réfugiés
Alors que les FDLR disent vouloir protéger les réfugiés rwandais, les opérations de rapatriement se poursuivent sous la coordination du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Le 21 octobre, 277 Rwandais ont traversé la frontière de Rubavu depuis l’Est de la RDC. En août, 532 réfugiés, représentant 168 familles, avaient déjà regagné le Rwanda. En trois mois, plus de 800 personnes ont donc choisi le retour volontaire, selon le HCR.
Parallèlement, le Rwanda poursuit le processus de démobilisation. Le 7 novembre, la 76e phase du programme a été lancée au centre de Mutobo, à Musanze, avec 156 anciens membres des FDLR et milices affiliées. Trois mois de formation sont prévus, axés sur la réinsertion, la discipline, et l’éducation civique.
Mais pour les FDLR, le HCR ne joue pas un rôle neutre. « Les réfugiés, ce sont nos parents, nos enfants. On ne peut pas séparer une famille rwandaise comme ça. Certains des gens envoyés au Rwanda avec l’aide du HCR sont des Congolais. Et d’autres sont capturés, puis renvoyés de force. Nous accusons le HCR de jouer le jeu du Rwanda », dénonce Octavien Mutimura.
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Rejet de toute collusion avec les FARDC, appel à « un dialogue entre présidents »
Le groupe armé, souvent accusé par les Nations unies de coopérer avec les Forces armées de la RDC (FARDC), dément fermement. « Les experts des Nations unies se trompent. Comment peut-on être à la fois amis et ennemis de Kinshasa ? Nous sommes traqués. Nous avons perdu beaucoup d’hommes et du matériel dans la traque de septembre 2024 », déclare le lieutenant-colonel Mutimura.
Selon lui, les FDLR se trouvent actuellement dans des zones contrôlées par l’AFC/M23, notamment à Bwisha, dans le territoire de Rutshuru, où elles affrontent régulièrement leurs adversaires. Concernant leurs capacités militaires, Mutimura reste évasif : « Nous avons un nombre consistant. L’effectif est significatif. Nous comptons sur notre détermination. »
Les rapports divers évoquent entre 1 500 et 3 000 combattants, mais le porte-parole estime que ce chiffre est sous-évalué.
Les FDLR appellent également les médiateurs qatariens et américains à accentuer la pression sur Kigali. « Il faut qu’ils mettent la pression sur Paul Kagame pour avoir un dialogue inclusif entre Rwandais. La solution en Afrique centrale, c’est que les présidents s’assoient et se parlent en toute franchise, pour que les peuples de la région vivent en paix et en symbiose », conclut Mutimura.
De multiples tentatives déjà engagées
Depuis deux décennies, plusieurs initiatives ont tenté de régler la question des FDLR. En 2001, un premier processus avait conduit au désarmement et au cantonnement des combattants à Kamina, ainsi qu’à la destruction publique d’armes à Kinshasa, en présence de la communauté internationale. En 2014, plus de 1 500 combattants avaient remis leurs armes à la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) et à la Mission de l’Organisation des Nations unies pour la stabilisation en république démocratique du Congo (MONUSCO), avant d’être cantonnés, avec leurs familles, dans les camps de Kisangani, Kanyabayonga et Walungu, toujours sous supervision internationale.
La même année, une réunion de Rome, organisée sous la médiation de la Communauté Sant’Egidio et représentée par le cardinal Matteo Maria Zuppi, avait réuni des représentants des États-Unis, de l’Union européenne, des Nations unies et du gouvernement congolais, dans une nouvelle tentative de dialogue et de démobilisation du mouvement.
De 2009 à 2015, plusieurs opérations militaires conjointes entre les FARDC, les Forces rwandaises de défense (RDF) et la MONUSCO ont été menées dans l’Est de la RDC, conjointement ou avec seulement les FARDC. Parmi elles : Umoja Wetu, Kimia I et II, Amani Leo, Amani Kamilifu ou encore Sokola II. Ces offensives ont provoqué des centaines de milliers de déplacés et de nombreuses pertes civiles, sans jamais régler définitivement la question.
Il reste à savoir comment va se dérouler la nouvelle campagne de lutte contre les FDLR, comment se passera la collaboration entre les FARDC et les RDF, et quel rôle jouera l’AFC/M23.
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