Violences post-électorales en Tanzanie: la société civile réclame des preuves sur la thèse des «jeunes étrangers»

En Tanzanie, la présidente Samia Suluhu Hassan met en cause des « jeunes étrangers » parmi les personnes interpellées lors des violences postélectorales. Lors de son investiture lundi 3 novembre, elle a promis un retour rapide à la normale, au lendemain de manifestations violemment réprimées qui auraient fait plus d’un millier de morts, selon des organisations de défense des droits humains. La police, elle, a mis en garde contre la diffusion d’images susceptibles de « provoquer la panique », alors que l’accès à internet reste partiel.
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En Tanzanie, plus de 1 000 morts et des centaines d’arrestations ont été recensés, selon l’Ordre des avocats du Tanganyika. « Ces événements sont indignes de l’image et des valeurs de la Tanzanie. Il n’est pas surprenant de constater que certains des jeunes arrêtés dans le cadre de ces incidents sont étrangers », a déclaré la cheffe de l’État, assurant que les services de sécurité poursuivent leurs investigations pour « rétablir au plus vite la situation habituelle ».
Mais ces accusations sont vivement contestées par la société civile. « Toutes les vidéos montrent des gens parlant swahili –des Tanzaniens. Si ces violences venaient vraiment de l’étranger, ce serait un grave échec du contrôle des frontières. C’est une histoire tout simplement inventée », affirme Fulgence Massiwa, directeur du Centre tanzanien des droits humains et juridiques.
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La société civile dénonce des attaques « stratégiques »
Les organisations locales dénoncent en parallèle des arrestations massives d’opposants, parfois sous des accusations de terrorisme. Le parti Chadema indique ainsi que son vice-président, John Heche, a été inculpé mercredi 5 novembre pour « actes terroristes », après son transfert d’une prison de Dodoma à un commissariat de Dar es Salaam. Le parti évoque au moins 800 morts lors des trois jours de répression qui ont suivi le scrutin.
De son côté, Human Rights Watch estime que la répression atteint une ampleur inédite et souligne que les restrictions d’internet compliquent toute vérification indépendante. Sur le terrain, le président de l’Ordre des avocats du Tanganyika, Boniface Mwabukusi, fait état d’un bilan encore plus lourd. « Les gens ont été attaqués de manière stratégique, jusque dans leurs maisons. Ce n’étaient pas des manifestants qui étaient visés », explique-t-il.
Nous n’avons pas de chiffre exact, mais je crains qu’il s’agisse de milliers de morts — pas d’un millier, mais de plusieurs milliers. (…) Ce ne sont pas des étrangers qui ont fait cela, c’étaient nos jeunes, ignorés par les autorités. Leur appel a été ignoré — c’est pour cela qu’ils sont sortis. Ils ne sont pas sortis comme des criminels
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