Sahara : le Polisario durcit le ton contre le Maroc, après l’adoption de la résolution des Nations Unies


À la suite de l’adoption par le Conseil de sécurité de l’ONU d’une nouvelle résolution sur le Sahara occidental, les positions se durcissent entre Rabat et le Front Polisario. Alors que le texte prolonge le mandat de la MINURSO et salue l’initiative marocaine d’autonomie comme base de négociation « réaliste », le mouvement indépendantiste sahraoui y voit une mise à l’écart de son droit à l’autodétermination. Entre soutien diplomatique au Maroc et méfiance du camp sahraoui, le processus onusien apparaît plus fragile que jamais.
Le Front Polisario : « entre être Marocains ou résister, nous résisterons »
Le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté une résolution renouvelant pour un an le mandat de la MINURSO et plaçant pour le processus de règlement du conflit du Sahara occidental l’option d’une « autonomie » sous souveraineté marocaine comme « base réaliste et sérieuse ». Pour autant, cette orientation diplomatique, loin d’apaiser les tensions, suscite la défiance farouche du Front Polisario, qui estime que son droit à l’autodétermination reste ignoré.
Interrogé par la chaîne espagnole RTVE depuis les camps de réfugiés de Tindouf (Algérie), le « chef du gouvernement » du Front Polisario, Buchraya Hamudi Beyoun, a réaffirmé que le mouvement était prêt à négocier « ce qui est présenté », mais uniquement à condition que l’issue soit acceptée par le peuple sahraoui. Il a précisé : « Entre être Marocains ou résister, nous résisterons ». Cette phrase illustre la détermination inchangée du Front, malgré l’évolution de la diplomatie internationale.
L’absence d’Algérie et l’abstention de la Russie et de la Chine
Un des éléments clés de cette dynamique est la non-participation de l’Algérie au vote. Beyoun a jugé ce geste comme « un véritable veto », l’Algérie ayant « en réalité » empêché l’adoption d’une version encore plus favorable au Maroc selon lui. Par ailleurs, l’abstention de la Russie et de la Chine est interprétée par le Front comme un signe qu’elles refusent une « imposition de la volonté des États-Unis ». Pour le Front Polisario, ces signaux confirment que le texte adopté ne bénéficie pas d’un consensus international solide et qu’il maintient la pression sur le Maroc et ses alliés diplomatiques.
Le Front Polisario ne qualifie pas la résolution de victoire. Il la juge « insuffisante ». Toutefois, Beyoun admet qu’elle a évolué par rapport aux premiers projets grâce à la pression de certains pays du Conseil. Il retient que le texte rappelle que la solution doit être « acceptée par les deux parties » et respecter le « droit à l’autodétermination ». Il insiste : « La résolution ne stipule pas que le peuple sahraoui doit accepter l’autonomie. En aucun cas. » Toutefois, il ajoute que tant que le Maroc refuse de négocier toute option hors de ses propres objectifs, et que les puissances occidentales semblent craindre un vote sahraoui libre, la crise reste ouverte.
Maroc : monopole du débat ou ouverture ?
Le Front accuse le Maroc de verrouiller les discussions. D’après Beyoun : « Nous nous demandons pourquoi l’Occident… craint que le peuple sahraoui puisse décider par les urnes ? » Pour le mouvement sahraoui, l’enjeu est clair : un référendum d’autodétermination libre et transparent. Or jusqu’à présent, la position marocaine et les soutiens internationaux privilégient une autonomie dans le cadre marocain, ce que le Front refuse tant que le vote d’un peuple sahraoui souverain n’est pas garanti.
Malgré la supériorité militaire que le Maroc revendique, soutenu selon Beyoun par la France, Israël et les États-Unis, il assure que le Front ne prévoit pas de « défaite ». « Le Maroc ne peut ni nous vaincre ni nous convaincre », a-t-il déclaré. Il rappelle que près de cinquante ans de conflit ont prouvé que la résistance sahraouie ne s’éteint pas et que son peuple s’en est « spécialisé ». Cette posture traduit la conviction que, tant que les jalons d’un référendum libre ne sont pas posés, la pression restera.