Sénégal: JOJ de Dakar J-1 an – Mohamed Diokh et Ibrahima Sarr, deux ados et un même rêve olympique
Mohamed Diokh et Ibrahima Sarr, 16 ans à peine, font partie de la relève de la lutte sénégalaise. Ces deux garçons biberonnés en pays sérère sont unis par l’espoir de représenter le Sénégal aux Jeux olympiques de la jeunesse de Dakar en 2026, et sont portés par la force d’une région où la lutte est bien plus qu’un sport.
De notre envoyé spécial à Palmarin,
Trois heures de route depuis la frénésie dakaroise. Puis, soudain, les plages qui apparaissent. Palmarin, dans la région de Fatick, village posé entre océan, bras de mer et mangrove, accueille sous la chaleur écrasante de midi. C’est ici, dans ce décor lumineux intensifié par l’éclat du soleil sur le sel blanc, qu’a grandi Mohamed Diokh, garçon discret, dernier espoir d’une lignée de lutteurs.
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Sur le toit ombragé de la maison familiale, Mohamed, tunique aux couleurs nationales sur les épaules, esquisse un sourire timide. À 16 ans, il pourrait être sélectionné pour représenter le Sénégal en lutte de plage (beach wrestling) lors des prochains JOJ à Dakar. Lui qui n’avait déjà jamais quitté Palmarin avant un stage en Chine. « J’étais stressé, tellement stressé… Je n’avais jamais vu un avion de près », avoue-t-il, la voix à peine audible, le sourire éclatant. « Mais là-bas, j’ai compris que la lutte, c’est universel. J’ai vu des jeunes comme moi, tous différents. Ça m’a appris beaucoup de choses. »
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Son père, le ton chargé de fierté, se dévoile : « Ce garçon-là, il a déjà vécu plus que moi à son âge. Quand il a été repéré, je me suis dit que la lutte allait encore nous apporter de la joie dans la famille. » Séko Diokh, ancien champion respecté, se souvient : « Sans me vanter, dans la lutte sénégalaise, je faisais partie des meilleurs de ma génération, avec Papis Général et Paul Maurice, mais Mohamed, à son âge, a déjà fait plus que moi. »
Un peu plus loin, dans la grande maison d’Ibrahima Sarr, les cris des enfants s’entremêlent aux trots d’un cheval qui passe au milieu de la cour, monté par l’oncle. Le père, Mamadou, ancien lutteur, présente son fils avec amusement. « Il dit qu’il est déjà plus fort que moi, mais je suis fier. Moi, j’ai arrêté la lutte pour nourrir la famille, mais lui, il va plus loin ». La confiance en bandoulière, Ibrahima, 16 ans, bombe le torse : « Ici, j’ai gagné plusieurs mbappatt (tournois de lutte traditionnelle) ». Il s’est choisi le surnom de Reug Reug comme son idole de champion, sérère comme lui.
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Pour Mohamed et Ibrahima, l’aventure ne fait que commencer. Sélectionnés parmi les meilleurs jeunes lutteurs âgés entre 14 et 16 ans, ils pourraient être du voyage pour le JOJ 2026 à Dakar. Un rêve immense, mais aussi une responsabilité. « Représenter le Sénégal, c’est grand », lâche Mohamed. Ibrahima acquiesce : « Je veux montrer au monde ce dont nous sommes capables. On ne connaît que la lutte depuis tout petits ».
Dans cette région sérère, la lutte n’est pas qu’un sport : c’est un rite, une éducation, un héritage. À Palmarin, chaque famille compte un lutteur, chaque enfant rêve de devenir le prochain champion. La lutte est partout : dans les discussions parlant du passé ou du présent. De Reug Reug à Yékini en passant par Siteu et Manga 2, qui drainent ou ont drainé des millions de supporters, et amassé d’énormes sommes d’argent.
Aujourd’hui, l’avenir se joue sur la plage, comme une évidence avec le beach wrestling. Les pieds nus dans le sable chaud, Mohamed et Ibrahima s’affrontent, s’entraînent, s’encouragent. Ils savent tous les deux l’importance des entraînements dans leur espoir de gagner une médaille lors des JOJ dans un an.
Mohamed, le timide, a découvert le monde grâce à la lutte. Deux mois en Chine donc, loin de la chaleur de Palmarin et du cocon familial. Depuis, il rêve plus grand.
Ibrahima, lui, a déjà goûté à la compétition au Maroc et à de la préparation de qualité en France. Quand il ne part en mer, comme jadis son père, pêcher pour la famille, il perfectionne ses prises avec Cheikh Ndiaye, ancien international sénégalais de lutte.
Khalifa Sow, Directeur technique national de la lutte, observe tout le temps avec bienveillance « ses » deux gamins. « L’élément fondamental, c’est la compétition », martèle-t-il. « Mohamed doit apprendre à se frotter à d’autres styles, Ibrahima a déjà ce bagage. On peut s’entraîner des mois, mais c’est la compétition qui révèle le vrai lutteur ».
Dans un an, Mohamed et Ibrahima devraient participer au plus grand événement sportif jamais organisé par leur pays. Ils sont déjà conscients que chaque entraînement, chaque conseil donné par leur papa ou par Khalifa Sow, les prépare à avoir les épaules solides pour porter leur rêve de médaille et inscrire leur nom sur le sable olympique.
Le beach wrestling un sport exclusivement JOJ Le beach wrestling, ou lutte de plage, est une discipline sportive, dérivée de la lutte traditionnelle. Comme son nom l’indique, elle se pratique sur le sable, généralement en plein air, dans un espace circulaire délimité. Deux adversaires s’affrontent pieds nus, vêtus de tenues légères. Le but : faire tomber l’adversaire ou le pousser hors du cercle. Les combats sont courts, dynamiques, et favorisent le spectacle grâce à la rapidité des actions et à la simplicité des règles. Les matchs se déroulent sur une période de trois minutes pour toutes les catégories d’âge. Pour un même lutteur, le temps minimal entre 2 combats et de 10 minutes. Le beach wrestling n’est actuellement présent qu’aux Jeux olympiques de la jeunesse (JOJ) et pas au JO. Cette discipline y est mise en avant pour son côté ludique, son accessibilité et sa capacité à attirer un public jeune et familial.



