Soudan du Sud: le projet «M(H)IND» veut sensibiliser les communautés à la santé mentale

Des interventions communautaires ont déjà été mises en place pour aider les Sud-Soudanais à faire face au stress. C’est le cas du projet Mental Health Integrated Development Project (projet de développement intégré de la santé mentale, en français, M(H)IND). Porté par l’ONG Amref Health Africa et le ministère de la Santé, il a permis de développer les soins de santé mentale dans huit comtés du Soudan du Sud depuis 2022.
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Avec notre envoyée spéciale à Mundri, Florence Miettaux
Une vingtaine de personnes sont assises face à un grand haut-parleur, concentrées sur la voix qui s’en échappe. C’est une session de Self-Help+, un cours de gestion du stress lancé par l’OMS en 2021 et introduit au Soudan du Sud en 2023 par le projet « M(H)IND ».
Myriam Maggy, bénévole, facilite les sessions : « Si, à la maison, ils pratiquent les exercices que nous leur montrons, ça va les aider, car la plupart des participants nous disent, par exemple, qu’ils n’arrivent pas à dormir la nuit à cause de leurs soucis. De plus, la crise économique que nous traversons ne fait qu’empirer les choses. Mais quand ils utilisent ces méthodes, ils reviennent et nous disent qu’ils vont mieux. »
Des exercices d’ancrage et des conseils pour se défaire du stress et de l’angoisse qui ont bien servi à Benjamin Kenneth Tona, un père de famille de 44 ans. Vétérinaire sans emploi depuis 2020, sa femme et ses enfants ont fui la guerre civile il y a dix ans : « Je n’ai pas de travail pour aider mes enfants qui sont actuellement dans un camp de réfugiés, en Ouganda. Et depuis que j’ai perdu mon emploi, je n’ai pas pu leur rendre visite. C’est à cause de cela que j’ai commencé à aller mal, à me sentir vide. Donc j’ai décidé de suivre cette formation et elle m’a beaucoup aidé ».
Benjamin Kenneth Tona souhaiterait que ce soutien aille au-delà des soins psychologiques et permette aux participants de mettre en place des projets économiques, afin d’améliorer leur quotidien.
« Impliquer les communautés » et miser sur la prévention
Au Soudan du Sud, pays en proie à des conflits incessants et à une pauvreté extrême, une véritable crise de la santé mentale est en cours. Le pays a le quatrième taux de suicide le plus élevé du continent africain, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), et plus d’un tiers de ses 13 millions d’habitants souffrent de troubles mentaux de divers ordres.
Vendredi 17 octobre, le ministère de la Santé a inauguré, à Juba, un « plan stratégique pour la santé mentale » d’une durée de cinq ans.
À cette occasion, RFI a rencontré l’une des architectes de ce programme, la psychiatre Atong Ayuel Longar, directrice de la Santé mentale au sein du ministère de la Santé sud-soudanais : « Le Soudan du Sud fait face à une situation complexe, en ce qui concerne la santé mentale, car de nombreuses ONG interviennent dans différents endroits du pays, sans que nous sachions toujours ce qu’elles font. Maintenant que nous avons un document programmatique qui décrit nos objectifs, nous pourrons rassembler les efforts qui sont aujourd’hui éparpillés. »
« Nous allons également tenter d’intégrer la santé mentale dans les centres de santé primaire et donc, dans le système de santé existant, poursuit-elle. Ce que nous voulons, c’est utiliser les services de santé communautaires, afin de faire de la prévention, pour éviter que les gens développent des formes graves de maladies mentales. Car si nous apprenons à tout un chacun comment gérer le stress, sans tomber dans des comportements négatifs, ou encore si nous apprenons aux gens à chercher de l’aide plus tôt, cela améliorera le pronostic des maladies. Car l’un des problèmes principaux, c’est que les gens consultent trop tard. Or, une détection et un traitement précoces des maladies mentales sont essentiels. C’est pourquoi nous devons impliquer les communautés », souligne Atong Ayuel Longar, directrice de la Santé mentale au sein du ministère de la Santé sud-soudanais.
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