Arrestation de militants du PDCI : une escalade préoccupante à l’approche de la Présidentielle en Côte d’Ivoire

Des menottes
Menottes

Alors que la Côte d’Ivoire entre dans la dernière ligne droite avant l’élection présidentielle de 2025, le climat politique se crispe dangereusement. Le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) accuse les autorités de mener une campagne d’intimidation contre ses militants, après l’arrestation controversée de plusieurs d’entre eux. Ces événements ravivent les craintes d’un processus électoral conflictuel, sur fond de soupçons de dérive autoritaire et d’instrumentalisation de la justice.

À moins de trois mois du scrutin présidentiel prévu en Côte d’Ivoire, les tensions politiques s’exacerbent à nouveau. Six militants du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA), principal parti d’opposition, ont été arrêtés ces derniers jours, a dénoncé la direction du parti lors d’une conférence de presse organisée jeudi à Abidjan. Trois de ces militants ont été formellement inculpés pour « troubles à l’ordre public » et « incitation à participer à des actions perturbatrices », selon les précisions fournies par les responsables du PDCI.

Tentative de déstabilisation du régime ?

Me Jean-Chrysostome Blessy, secrétaire exécutif du parti chargé de la veille juridique, a exprimé sa vive inquiétude quant aux conditions dans lesquelles ces arrestations ont été effectuées. Il a souligné que seuls un des militants arrêtés l’a été dans un cadre conforme aux procédures judiciaires, tandis que les cinq autres auraient été appréhendés de manière illégale. « On ne peut tolérer que des individus en civil procèdent à des enlèvements, sans mandat ni procédure officielle, avant de transférer les personnes arrêtées à la gendarmerie. De telles pratiques sont non seulement illégales mais remettent en cause l’intégrité de l’ensemble de la procédure pénale », a-t-il dénoncé.

Ces arrestations interviennent dans un climat politique tendu, où des rumeurs d’un prétendu projet insurrectionnel circulent dans les milieux proches du pouvoir. Me Blessy a fermement rejeté toute allégation d’implication du PDCI dans une quelconque tentative de déstabilisation du régime en place. Il a également réfuté les accusations de préparation d’un « CNT bis », en référence au Conseil National de Transition que l’opposition avait tenté de mettre en place après la Présidentielle contestée de 2020. « Le PDCI reste fidèle à ses principes de démocratie, de république et de paix. Notre combat se mène dans le cadre de la légalité et du respect des institutions », a-t-il martelé.

Échappée à une tentative d’enlèvement

Le porte-parole du PDCI, Brédoumy Soumaïla Traoré, a pour sa part affirmé avoir échappé à une tentative d’enlèvement. Selon ses propos, des individus cagoulés auraient reçu pour instruction de le « neutraliser ». Il affirme avoir été mis à l’abri suite à une alerte lancée par la direction du parti, et grâce à l’intervention du président du PDCI, Tidjane Thiam. Ce dernier, récemment désigné comme le candidat du parti pour l’élection présidentielle, apparaît de plus en plus comme une cible politique dans ce contexte particulièrement volatile.

Du côté du pouvoir, la réaction est restée prudente. Kobenan Kouassi Adjoumani, porte-parole du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), formation au pouvoir, a déclaré ne pas vouloir s’immiscer dans les affaires judiciaires. « Je ne suis pas en mesure de dire pourquoi ces personnes ont été arrêtées. Pour cela, il faut s’adresser au juge en charge du dossier », a-t-il affirmé lors d’une conférence de presse mercredi dernier.

Violences et à des arrestations arbitraires

Il a néanmoins adressé une mise en garde claire à l’opposition : « Il n’y aura pas de CNT bis en Côte d’Ivoire. L’opposition doit revoir ses méthodes et s’adapter aux réalités actuelles ». Ni le parquet d’Abidjan ni le gouvernement n’ont, pour l’heure, officiellement commenté ces arrestations, laissant planer un flou juridique et politique sur une affaire qui soulève de nombreuses interrogations.

Cette affaire n’est pas sans rappeler les épisodes post-électoraux de 2010 et 2020, où des contestations du processus électoral avaient donné lieu à des violences et à des arrestations arbitraires. En 2020, l’opposition avait annoncé la création d’un Conseil national de transition, initiative jugée illégale par les autorités et qui avait conduit à l’arrestation de plusieurs figures politiques, dont Pascal Affi N’Guessan, président du FPI tendance légale, et Maurice Kakou Guikahué, cadre du PDCI.

Appel au respect des libertés politiques fondamentales

À l’époque, le pouvoir avait justifié ces arrestations par la volonté de prévenir toute tentative de déstabilisation, tandis que l’opposition dénonçait une dérive autoritaire et une instrumentalisation de la justice. De nombreux observateurs internationaux, dont la Commission africaine des droits de l’Homme et des Peuples, avaient alors appelé au respect des libertés politiques fondamentales et à l’ouverture d’un dialogue inclusif.

À l’approche de l’élection présidentielle de 2025, les derniers événements montrent que les vieux démons du passé ne sont pas encore exorcisés. Le climat de méfiance persiste entre le pouvoir et l’opposition, tandis que les arrestations de militants, les accusations d’enlèvement et l’absence de communication des autorités judiciaires risquent d’aggraver la situation.

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