Mali: Être chauffeur routier, un métier risqué au pays
Des centaines de camions citernes sont bloqués près de la frontière ivoirienne. Par peur des djihadistes, leurs chauffeurs refusent de se rendre à Bamako.
Au Mali, le Synacor, le Syndicat des chauffeurs et transporteurs routiers, porte plainte contre Aboubacar Sidick Fomba. Ce membre du Conseil national de transition, l’organe législatif non élu de la transition militaire, a accusé, le week-end dernier, les chauffeurs de camions-citernes de complicité avec les terroristes.
Des propos qui ont suscité l’indignation des transporteurs qui ont d’abord décidé d’une grève illimitée, avant de revenir sur leur décision. Aboubacar Sidick Fomba a finalement présenté ses excuses aux chauffeurs.
Si le Synacor a accepté de suspendre son mot d’ordre de grève illimitée, le syndicat a toutefois maintenu la saisine de la justice et donc déposé une plainte visant Aboubacar Sidick Fomba.
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Laver son honneur
Pour Fousseiny Diallo, secrétaire du Synacor, « la façon dont ce conseiller du CNT s’est prononcé, c’est comme s’il détenait les preuves de ce qu’il avance comme argument. Voilà pourquoi nous avons insisté afin que l’affaire soit tranchée devant les tribunaux. La personne qui nous a accusés de complicité avec les terroristes n’est pas un citoyen lambda, c’est une figure du pouvoir en place. Il est donc normal qu’on porte plainte pour laver notre honneur. »
Siriki Kouyaté, journaliste et chroniqueur radio, estime que le temps n’est pas « aux accusations gratuites ». Selon lui, « il est temps qu’on évite certaines choses, il est temps que ceux qui parlent dans les médias fassent extrêmement attention. Parce que de telles accusations peuvent, à la longue, avoir des conséquences très graves. Nous sommes dans une guerre et dans une guerre, lorsqu’il y a une confusion de ce genre, cela peut davantage compliquer les choses dans les jours à venir. »
En attendant, les chauffeurs d’environ 500 camions-citernes, bloqués à Kadiana, une localité malienne, située à la frontière entre le Mali et la Côte d’Ivoire. Ils refusent de se rendre à Bamako, craignant pour leur sécurité, même avec une escorte militaire.
Crise du carburant
Les chauffeurs de ces camions, craignant pour leur vie, préfèrent rester pour l’instant sur place.
C’est ce qu’explique ce chauffeur qui a choisi de rester anonyme : « La principale difficulté, c’est la manière dont les convois sont escortés par l’armée. Ces derniers jours, nos convois ont subi trois attaques djihadistes simultanées qui ont, à chaque fois, fait des victimes dans nos rangs, chauffeurs et apprentis. Nous aimerions que la façon dont on escorte nos camions change. Pour nous, il est donc important que nous échangions avec les forces armées pour convenir d’un schéma qui assurerait notre sécurité lors de l’escorte. »
Selon les chauffeurs, il y aurait eu au moins sept morts, vendredi dernier (17.10), entre Kadiana et Sikasso, lors de l’attaque d’un convoi de camions-citernes venant de la Côte d’Ivoire.
Dans une apparition publique, le premier ministre de transition, le général Abdoulaye Maïga a indiqué « ce qui nous arrive est un changement de mode opératoire et une tentative de déstabilisation ».
Cette situation devrait aggraverla crise de carburant au Mali et notamment à Bamako, où les files d’attente sont de plus en plus longues devant les stations-services qui ont encore de l’essence.


