Mali: une étude pointe le «détournement» d’armes des forces maliennes par Wagner

Le groupe Wagner a utilisé les armes des forces maliennes pour commettre des crimes de guerre, selon un rapport de l’Initiative mondiale contre la criminalité transnationale organisée (Gitoc) paru jeudi 16 octobre. Le groupe paramilitaire russe Wagner a opéré au Mali à partir de décembre 2021. Il a été remplacé en juin dernier par l’Africa Corps, rattaché au ministère russe de la Défense, mais ses combattants sont largement restés les mêmes. Les chercheurs du Gitoc accusent Wagner d’avoir « détourné » les armes de leurs partenaires maliens.

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Ses services étaient chèrement payés par les autorités maliennes de Transition : 10 millions de dollars par mois selon les services américains. Pour autant, selon le Gitoc, « le groupe Wagner n’est pas arrivé au Mali entièrement équipé » et ses mercenaires ont résolu le problème « en saisissant des armes lors des affrontements » et surtout « en volant dans les stocks officiels. »

Le rapport se fonde principalement sur des entretiens avec des militaires maliens et sur des sources ouvertes, notamment des centaines de photos et de vidéos issues de chaînes Telegram pro-Wagner ou de comptes de soldats maliens sur les réseaux sociaux, analysées par des experts en armement.

Armes lourdes

Véhicules blindés de combat, mitrailleuses lourdes montées sur véhicules, peut-être même des drones : ces équipements appartenant à l’armée malienne, dont l’étude dresse une liste très détaillée et technique, ont été utilisés par leurs partenaires russes, y compris lors de missions où Wagner opérait seul. Ces « détournements », tels que les qualifient les auteurs du rapport, n’ont rien de surprenant puisque Wagner jouait le rôle de supplétif de l’armée malienne.

Mais le Gitoc pointe des violations du droit du commerce des armes – ce qui pourrait avoir des conséquences juridiques pour les pays fournisseurs – et révèle les tensions créées sur le terrain : « Ils conduisent eux-mêmes les véhicules des Fama, déplore un soldat malien interrogé dans le centre du Mali, ils ne nous font pas confiance. »

Après des combats victorieux contre les groupes jihadistes ou rebelles, « dans de nombreux cas », écrivent les auteurs, « les troupes Wagner ont devancé les unités des Fama pour s’emparer du matériel capturé », ce qui aurait réduit le butin de l’armée et créé des tensions avec les soldats maliens. Les tensions ont été renforcées, selon le rapport, par des relations souvent conflictuelles, les combattants de Wagner insultant fréquemment les soldats maliens ou les accusant de « lâcheté », en personne et sur les réseaux sociaux.

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Exactions

L’arrivée de Wagner au Mali a provoqué une explosion des violences contre les civils. De nombreux cas d’exactions – massacres collectifs, exécutions sommaires, tortures, viols, pillages – ont été documentés par des journalistes, des organisations de défense des droits humains ou encore par les Nations unies.

Selon l’ONG spécialisée Acled, 866 civils ont été tués en 2024 par Wagner et l’armée malienne, lors de 215 « incidents », contre 78 décès de civils lors de 39 « incidents » en 2021, avant l’arrivée de Wagner. Le cas le plus emblématique est celui de Moura, en 2022, où plus de 500 personnes ont été tuées par l’armée malienne et Wagner.

En juin dernier, le groupe privé Wagner a été remplacé par l’Africa Corps, contrôlé par le ministère russe de la Défense. Depuis cette passation, les auteurs du rapport reconnaissent ne pas être en mesure de dire si ces « détournements » ont cessé ou s’ils se poursuivent.

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