Madagascar: double mobilisation pro et anti-gouvernement à Antananarivo

Ce samedi 4 octobre devait être une journée de mobilisation, à Madagascar, et même une double mobilisation, à l’appel, d’un côté, des opposants du mouvement Gen Z et, de l’autre, des partisans du président Andry Rajoelina. Le centre-ville de la capitale, Antananarivo, était toujours sous haute protection policière, à la mi-journée et peu d’habitants ont répondu à l’appel. Pendant ce temps, le chef de l’État consulte.
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Avec notre correspondant à Antananarivo, Guilhem Fabry
Quelques centaines de partisans du président Andry Rajoelina se sont réunis, en milieu de journée, dans deux quartiers de la capitale, à Andavamamba et à Ankorondrano. « Tsy Mila – coup d’État, non au coup d’État », pouvait-on lire sur quelques pancartes. Il n’y a pas eu de grand rassemblement au Coliseum d’Antsonjombe comme il en avait été question dans la matinée.
Ces manifestants redoutent que l’instabilité politique entraîne un effondrement économique. « Si le président doit partir, c’est en respectant le cadre constitutionnel, donc pas avant les prochaines élections », nous expliquait ainsi Lahimana, un entrepreneur en informatique de 43 ans.
Au niveau politique, l’instabilité n’amène rien. Voir que Madagascar va encore reculer trois ans, cinq ans en arrière parce qu’on va passer à une transition, je pense que ce n’est pas une bonne idée.
Lahimana, entrepreneur en informatique
Il est descendu dans la rue, après qu’un partisan du pouvoir soit passé dans son quartier avec un mégaphone. D’autres ont vu des appels à soutenir le président Rajoelina circuler sur les réseaux sociaux.
Du côté du collectif Gen-Z, les jeunes manifestants n’ont pu se rassembler sur la place d’Ambohijatovo, le centre-ville étant quadrillé par un imposant dispositif de sécurité. Un rassemblement est tout de même signalé près du lac Anosy.
Le président Rajoelina consulte des hauts fonctionnaires
Toute la journée au palais d’Iavoloha, le Président Rajoelina a reçu les forces vives de Madagascar afin de trouver une issue à la crise. Des consultations retransmises en direct sur Facebook. Le chef de l’État a convié des hauts fonctionnaires de l’État. « Il est temps d’assainir et d’améliorer les administrations publiques, à tous les niveaux, pour mettre en place une nouvelle gouvernance, répondant davantage aux besoins du peuple », a déclaré le président Rajoelina. Puis est venu le tour du monde économique. Le Groupement des entreprises de Madagascar a listé les conditions à remplir pour une reprise durable de l’activité. Parmi celles-ci : le respect des libertés d’expression et de circulation, mais aussi un « encadrement responsable des manifestations afin d’éviter toute escalade de la violence ».
Également conviée, la société civile malgache se montre quant à elle très sceptique. Dans un communiqué publié, samedi 4 octobre, plus de 300 organisations dont Transparency International Initiative Madagascar et l’Alliance Voahary Gasy, conditionnent leur participation à un dialogue à « la cessation de toutes formes de répression par les forces de sécurité ».
Consulté la veille, le Conseil chrétien des Églises de Madagascar s’est quant à lui dit prêt à organiser une médiation entre le pouvoir et les contestataires.
Inquiétude de Reporters sans frontières
Alors que la contestation se poursuit, au moins six journalistes ont été pris à partie, lors des manifestations, certains frappés par les forces de l’ordre, indique Reporters sans frontières (RSF) qui appelle les autorités à protéger les journalistes et qui indique suivre l’enquête, lancée par les autorités, sur un cas d’agression.
En l’espèce de ce que nous avons documenté, ils [les journalistes] sont pris à partie et leur travail souvent entravé. Certains d’entre eux ont été blessés, d’autres carrément agressés, ciblés d’une manière générale. Nous appelons les autorités à les protéger d’urgence lors de ces manifestations. Il est aussi important d’identifier et de sanctionner les responsables de ces violences […]. Il est important de protéger le travail des journalistes. Leur rôle, c’est d’informer, même si la situation est difficile. Les journalistes doivent pouvoir être toujours en train d’informer et ne pas être ciblés, ni pris à partie par les forces de défense et de sécurité.
Sabidou Marong, directeur du bureau Afrique de RSF



