Tunisie: Energie solaire – Un moteur de développement inexploré

Face à la montée des prix des hydrocarbures, à la pression environnementale et aux besoins croissants en électricité, la Tunisie a intérêt à transformer son atout naturel, le soleil, en levier de croissance durable.

Si les projets se multiplient, la transition reste encore fragile et semée d’obstacles.

Selon l’Agence nationale pour la maîtrise de l’énergie (Anme), la Tunisie bénéficie d’un rayonnement solaire annuel moyen de 1 800 à 2 600 kWh/m², bien supérieur à celui de nombreux pays européens déjà avancés dans le solaire.


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Le sud tunisien, notamment à Tataouine et Kébili, est considéré comme une « ceinture dorée » pour les investissements photovoltaïques et thermo-solaires. Ce gisement est d’autant plus stratégique que la consommation nationale d’électricité croît de près de 3% par an, tirée par l’urbanisation et l’industrialisation. Actuellement, 90 % de la production électrique provient du gaz naturel, dont plus de la moitié est importée d’Algérie.

Objectifs ambitieux mais retard dans l’exécution

Le Plan Solaire Tunisien (PST), lancé en 2012 puis actualisé en 2016, prévoit de porter la part des énergies renouvelables à 35 % du mix électrique d’ici 2030.

Concrètement, cela représente environ 3,8 GW de capacités nouvelles à installer, dont 70% en solaire photovoltaïque.

Pour l’heure, les résultats restent modestes : en 2024, les énergies renouvelables ne couvraient que 7 % de la consommation nationale, loin des prévisions initiales. Plusieurs appels d’offres ont été attribués à des opérateurs tunisiens et étrangers, mais des lenteurs administratives et des difficultés de financement freinent l’exécution.

Des projets structurants à l’échelle nationale et régionale

Malgré ces obstacles, quelques avancées notables méritent d’être soulignées, notamment la centrale de Tozeur I (10 MW) et Tozeur II (10 MW), déjà opérationnelles, qui alimentent plusieurs dizaines de milliers de foyers, Tataouine Solar Park (200 MW), attribué à des investisseurs étrangers, devrait être l’une des plus grandes centrales solaires d’Afrique du Nord. Et le projet TuNur, à Kébili, ambitionne d’exporter de l’électricité solaire vers l’Europe via un câble sous-marin reliant la Tunisie à l’Italie. Ces initiatives s’inscrivent dans une logique double : répondre aux besoins internes tout en positionnant la Tunisie comme fournisseur régional d’énergie verte.

Un moteur socio-économique pour les territoires

L’énergie solaire n’est pas seulement une question de transition énergétique : elle représente aussi un levier de développement local. Volet agriculture, l’utilisation des pompes solaires pour l’irrigation réduit la dépendance au gasoil et permet une meilleure gestion de l’eau. Pour ce qui est de l’emploi, chaque mégawatt solaire installé génère environ 20 à 30 emplois directs et indirects, allant de l’ingénierie à la maintenance. Entrepreneuriat, de jeunes start-up tunisiennes se spécialisent dans la fabrication de panneaux, l’installation photovoltaïque domestique et les solutions de stockage.

Comparaison régionale : la Tunisie à la traîne ?

Dans la région Mena, la Tunisie avance mais reste en retrait par rapport à ses voisins. Au Maroc, plus de 4 GW de capacités renouvelables déjà installées, avec un mix électrique à 37 % vert en 2024. En Égypte, plus de 1,5 GW de solaire à Benban, l’un des plus grands parcs photovoltaïques du monde. En Arabie Saoudite, il y a une stratégie visant à dépasser les 50 GW de solaire d’ici 2030. À l’échelle internationale, la Tunisie possède les atouts mais peine encore à créer un cadre réglementaire et financier attractif.

Défis à surmonter

La transition solaire tunisienne reste freinée par le financement : coût élevé des projets et difficultés d’accès au crédit pour les PME locales, la régulation : lourdeurs administratives et cadre juridique encore instable, la technologie : dépendance aux importations de panneaux et d’équipements de stockage et le réseau électrique : nécessité de moderniser les infrastructures pour accueillir une production intermittente. Malgré ces défis, l’énergie solaire demeure un axe prioritaire pour la Tunisie. Car elle permettrait de réduire la dépendance aux hydrocarbures importés, créer des milliers d’emplois qualifiés et positionner le pays comme pont énergétique entre l’Afrique et l’Europe.

Si la Tunisie parvient à accélérer l’exécution de ses projets, le solaire pourrait bien devenir l’un des piliers de sa souveraineté énergétique et de son développement économique.

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