Afrique de l'Ouest: CEDEAO – Le mandat piégé ?

Depuis le 22 juin 2025, date à laquelle le président Julius Maada Bio de Sierra Leone a succédé au Nigérian Bola Ahmed Tinubu, jamais dans l’histoire récente de la CEDEAO le mandat d’un président en exercice n’a été aussi émaillé de défis, pour dire le moins.

En lui confiant les rênes de la CEDEAO pour une année, les chefs d’État avaient bien mesuré les enjeux au regard du contexte. En effet, il avait juste un mois pour éviter la rupture, avant la date du 29 juillet, qui était le terme fixé par l’institution régionale pour la durée de la transition, avant le départ définitif des pays de l’AES, de la CEDEAO.

Il faut avouer que c’est très mince, pour ne pas dire impossible, d’autant plus que les tentatives antérieures des présidents Faure Gnassingbé du Togo et Bassirou Diomaye Faye du Sénégal, qui ont eu lieu sous la présidence de Bola Tinubu, n’ont pas, il est vrai, fait avancer la cause. D’ailleurs le président togolais, l’ayant senti, a préféré plutôt déployer ses efforts de médiation vers la RDC.


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Les initiatives diplomatiques du président nouvellement élu du Ghana, n’ont pas prospéré ; les pays de l’AES ayant préféré poursuivre leur processus d’intégration, d’ailleurs très avancé. La CEDEAO elle-même ayant entamé le processus de séparation, notamment en ce qui concerne ses effectifs (de nationalité nigérienne, malienne et burkinabè) et au niveau de ses programmes.

Toutefois, il faut reconnaitre que le contexte régional n’offre pas à l’analyse beaucoup d’angles de tir, au point que certains observateurs avaient considéré le mandat du président Maada Bio comme « un mandat par défaut » ou un mandat piégé. Vrai ou faux, il faut dire que les candidats ne se bousculaient pas au poste.

D’abord, le président sortant du Nigéria avait fait 2 mandats, et visiblement n’en voulait plus. Ensuite, le président sénégalais était peu enthousiaste, malgré les fausses annonces qui ont « fuité ». Il avait un avant-goût de ce qui l’attendait avec son expérience de médiation qui a tourné court. Patrice Talon du Bénin, lui, est sur le départ avec son second et dernier mandat à la tête du Bénin. De plus il a un lourd contentieux avec le Niger frontalier.

Quant à Alassane Ouattara, il était en course pour sa réélection à un 4e mandat sans le dire, et ne faisait aucun doute sur sa non-candidature pour diriger la CEDEAO. Enfin, Faure Gnassingbé, qui, par l’entrée en vigueur de la nouvelle Constitution du Togo, ne serait plus président de la République pour siéger au cénacle du sommet des chefs d’État. D’ailleurs il a tiré les enseignements de son expérience de médiation entre la CEDEAO et l’AES.

De toute évidence, le Ghana, qui était en période préélectorale à l’issue incertaine, laquelle n’impliquait pas le président en exercice, qui achevait son second et dernier mandat, n’était pas en lice. Bref, il ne restait que la Sierra Leone, la Gambie, la Guinée-Bissau, la Guinée (qui venait de faire l’objet de sanctions par la CEDEAO) et le Libéria.

Il s’y ajoute que si l’on regarde l’agenda électoral de l’Afrique de l’Ouest, on se rend compte que 2025-2026 sera une période électorale présidentielle, notamment au Bénin, en Côte d’Ivoire et en Gambie (présidentielle et législatives), en Guinée-Bissau, probablement en Guinée, au Cap-Vert, avec des tensions et des incertitudes déjà perceptibles et sur lesquelles la CEDEAO est presque aphone. Que peut-elle dire ?

Les perspectives annoncent donc un mandat complexe pour le président Maada Bio, qui malgré ses initiatives n’arrive pas encore à trouver un déclic, qui serait un marqueur visible et perceptible de son mandat. L’urgence est aujourd’hui à la prévention des conflits électoraux et postélectoraux, par anticipation. Or, aucune initiative majeure n’est entamée face aux manœuvres en cours dans les deux Guinées, et en Côte d’Ivoire (pour ne citer que ceux-là), qui laissent planer de gros nuages sur la stabilité de l’Afrique de l’Ouest en proie à la menace sécuritaire.

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