Togo : Que faut-il retenir de l’arrestation de Marguerite Gnakadè ?

L’ancienne ministre togolaise des Armées, Marguerite Gnakadè, a été arrêtée, provoquant une onde de choc sur les réseaux sociaux. Au-delà de l’émotion, ce sont pourtant les faits qui vont permettre de comprendre l’affaire…

L’ancienne ministre togolaise des Armées, Marguerite Gnakadè, a été arrêtée, provoquant une onde de choc sur les réseaux sociaux. Au-delà de l’émotion, ce sont pourtant les faits qui vont permettre de comprendre l’affaire…

Elle était devenue, en octobre 2020, la première femme ministre des Armées du Togo. Mais après deux ans à son poste, Marguerite Gnakadè avait été relevée de ses fonctions lors d’un remaniement gouvernemental. Le ministère des Armées avait alors été rattaché directement à la présidence de la République, ce qui avait automatiquement fin à son mandat. Le limogeage de Marguerite Gnakadè, qui n’avait pas été motivé publiquement par des accusations pénales, démontrait déjà qu’elle n’était pas protégée par un quelconque statut privilégié, contrairement à ce que certains affirment aujourd’hui. L’épisode s’inscrivait plutôt dans un ajustement politique et institutionnel, confirmant qu’aucune fonction publique n’immunise contre les décisions de l’État.

Des « éléments jugés graves » trouvés lors de l’enquête

Son arrestation ces derniers jours a provoqué une onde d’émotions sur les réseaux sociaux, sur lesquels les activistes se sont rapidement emparé du sujet pour accuser les autorités togolaises de vouloir « faire taire une voix dissonante ». Mais les premières révélations semblent démontrer qu’on est bien loin d’une arrestation politique. Jeune Afrique, par exemple, évoque des « éléments jugés graves » trouvés par les enquêteurs, dans « une affaire de recrutement de mercenaires étrangers afin de déstabiliser les institutions ». Marguerite Gnakadè avait notamment publiquement incité l’armée à la rébellion. De quoi constituer une base solide pour l’enquête en cours, qui doit désormais faire la lumière sur une potentielle atteinte à la sûreté de l’Etat. Ce sera désormais au procureur de la République, seul habilité à détailler les faits reprochés, de donner des précisions sur cette affaire…

Tentative de fragiliser le retour à la stabilité

En attendant, la bataille lancée par les activistes, notamment du M66, le mouvement qui conteste la réforme constitutionnelle et dont plusieurs membres sont sous le coup d’un mandat d’arrêt international, se déroule sur les réseaux sociaux. Les groupes d’opposition se sont empressés de dérouler leur version des faits, avant même que la réalité des faits soit connue. Un tribunal médiatique qui a pour objectif de relancer les tensions de ces derniers mois, alors qu’un climat d’apaisement avait rapidement été retrouvé au Togo. « La stratégie consiste à faire de Mme Gnakadè une victime de la liberté d’expression avant même de savoir ce qui lui est exactement reproché, affirme un observateur de la vie politique. Or, l’opposition a pignon sur rue au Togo, comme on peut le voir avec Jean-Pierre Fabre ». Les forces de déstabilisation, parfois alimentées de l’extérieur, cherchent à nouveau à fragiliser ce retour à la stabilité en s’emparant de cette affaire, explique-t-il.

« Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et exécutif »

Au-delà des messages relayés sur les réseaux sociaux et dans les médias anti-Faure Gnassingbé, plusieurs principes demeurent : la présomption d’innocence et l’égalité devant la loi garantie pour chaque citoyen. « Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et exécutif », rappelle Koffi Amessou Adaba, enseignant et chercheur en sociologie politique. « Si les débats politiques et les divergences d’opinion sont le propre d’une démocratie vivante, ils devraient s’appuyer sur des faits et non sur des insinuations ou des rumeurs », poursuit un spécialiste politique qui appelle, au-delà du cas personnel de Marguerite Gnakadè, à « la nécessité pour chacun, qu’il soit citoyen, responsable politique ou acteur médiatique, de contribuer à un débat démocratique responsable et apaisé ». Dans cette affaire, le Togo a tout à gagner à ce que la justice suive son cours en toute indépendance et que les institutions continuent de fonctionner dans la transparence. L’équité, l’égalité de traitement et le respect des procédures ne sont pas seulement des principes abstraits : ils sont la condition de la confiance collective et du vivre-ensemble.

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